L'ULTIME FRONTIERE : SUITE

On sait donc qu'une fusée se propulse en éjectant des gaz à grande vitesse. Si le ballon que vous lancez est plus lourd, vous reculerez plus. De même, si le ballon est envoyé avec une plus grande vitesse, vous reculerez plus aussi.

La force de poussée dépend donc tant de la masse éjectée que de la vitesse d'éjection. Plus précisément, la force dépend de la masse du ballon (par ex.) et de l'accélération que l'on communique au ballon.

Souvenez-vous, le ballon repousse le patineur PENDANT le lancé, donc pendant que le ballon accélère. La formule a été trouvée par Sir Isaac Newton, et, depuis, a eu le temps de faire le tour du monde : F= M A avec : F (la force en Newton); M (la masse en Kg) et A (l'accélération en m/s²: mètre par seconde au carré).

Lancer un ballon, c'est lancer UNE masse en UNE fois. Je pourrais envoyer la masse en plusieur morceaux. C'est un peu l'idée du jet d'eau ou de gaz. La quantité totale est éjectée en un certain temps. On a plus une masse à un instant donné, on a une masse sur un certain temps, donc : un débit.

Imaginons un réservoir d'une certaine contenance sur lequel on branche une pompe suivie d'un tuyau et d'une lance.

Dans l'équation: F = M*A, A représente l'accélération, et l'accélération, c'est la variation de la vitesse par rapport au temps.

Pour décrire les performances d'une voiture, on donne parfois le temps qu'il lui faut pour atteindre 100km/h.

On dira, par exemple: cette voiture accélère de 0 à 100km/h en 7 secondes (une bonne GT).

L'accélération est exactement la même si elle passe de 20 à 120km/h (toujours 100km/h de différence) en 7 secondes.

Vous l'avez compris, ce qui compte c'est la différence de vitesse (par exemple: 100km/h), et l'écart de temps.

Une accélération (A) c'est donc une différence de vitesse sur une différence de temps.

Donc, on aura : A = la variation de vitesse/ la variation de temps, ou A = dv/dt.

Cette expression (dv/dt) représente une dérivée, si vous n'avez pas la moindre idée de ce que cela représente, il y a quelques explications ici: Clic

F = m*a peut donc s'écrire: F = m*dv/dt

Il est mathématiquement tout à fait valable de placer le dénominateur (dt) sous le m plutôt que sous le dv.

L'équation devient: F = m/dt*dv.

Cette fois la force apparaît comme une masse par unité de temps (m/dt) multipliée par une différence de vitesse donc par une vitesse (dv).

Une masse par unité de temps c'est un débit (massique dans ce cas, donc exprimé en kg/s).

La poussée (la force) apparaît donc cette fois comme le produit du débit (d'eau de la lance à incendie, par exemple) multiplié par la vitesse d'éjection (d'eau de la lance à incendie, toujours par exemple).

Ce qui est valable pour la lance d'incendie est bien sûr valable aussi pour les fusées, où l'eau est remplacée par des gaz.

Pour obtenir plus de poussée, il faut donc : soit, augmenter le débit, soit augmenter la vitesse d'éjection.

Augmenter le débit n'est pas la solution. En effet, la consommation d'un moteur fusée est déja si énorme que les réservoirs, représentants pourtant plus de 80% de la masse totale de la fusée, se vident en quelques minutes. Il est donc absolument capital d' augmenter la vitesse d'éjection.

La vitesse d'éjection dépend essentiellement de la légèreté des gaz éjectés (masse moléculaire faible) et de la température de combustion. La pression de combustion a une certaine importance, mais moins qu'on ne pourrait le croire. Voici d'ailleur la formule permettant de calculer la vitesse d'éjection théorique des gaz (c'est à dire : sans tenir compte du frottement ou d'autres limitations dues à la conception du moteur).

Avec :

R= constante des gaz (env. 8.31);

Tc= température de combustion;

M= masse moléculaire;

Pc= pression de combustion;

Pe= pression extérieure;

et enfin K= rapport des chaleurs spécifiques Cp/Cv.

Cp= chaleur spécifique à pression constante; Cv= chaleur spécifique à volume constant.

Sékwaça??????????????

La chaleur spécifique d'une substance est la quantité d'énergie calorifique (de chaleur pour faire simple) qu'il faut apporter à 1 gramme de cette substance pour élever sa température de 1° (La formule de base stipule : 1degré kelvin, mais les degrés celsius étant centigrades eux aussi, ça marche pareil).

Remarque : Cp est toujours plus grande que Cv, car, pour Cv, le volume est constant. L'apport d'énergie ne fournira donc aucun travail qui en consommerait (une augmentation de volume est un travail). Si aucun travail n'est produit, TOUT l'apport énergétique sert à faire monter la température, c'est pourquoi il y a un moins grand besoin énergétique pour gagner 1° dans le cas de Cv qui peut être plus petite.

Dans la formule ci-dessus, L'influence de la pression de combustion (Pc) est moins importante que celle de la température, entre autre. C'est peut être contre-intuitif mais vrai. Prenons un exemple : avec un rapport de détente ( Pe/Pc ) de 68, on atteignait une vitesse d'éjection de 2700 m/s sur le premier étage de saturn V pour le couple de propergol : oxygène liquide/Kérozène. Avec le même mélange, les russes obtenaient, sur leur fusée, une vitesse d'éjection de 3100 m/s pour un rapport de détente (Pe/Pc) de 150.

L'augmentation de pression est supérieure à 100%, mais la vitesse n'a augmenté que de moins de 15%.

La formule ci dessus, donne une vitesse d'éjection THEORIQUE. Dans la réalité cette vitesse est un peu plus faible, du fait, entre autre, des forces de frottement, et des conditions d'adaptabilité de la tuyère.

L'écart n'est pas négligeable, car, si nous reprenons l'exemple de la vitesse d'éjection donnée pour le moteur du premier étage de saturn V(2700 m/s) nous voyons bien qu'elle diffère sensiblement de la vitesse d'éjection théorique pour les même propergols au même rapport de détente, et qui est de : 2950 m/s.

De plus, la vitesse d'écoulement dans une tuyère est loin d'être régulière. Voyez plutôt.

L'image de la tuyère est extraite d'un document de l'ONERA sur www.onera.fr

Voici une autre image (en provenance de l'onera aussi d'ailleur) montrant l'écoulement dans une tuyère.

Sur ces images, mach 1 est atteint au col, pas avant, ou alors imperceptiblement.

Sur un profil d'aile, mach 1 PEUT être atteint plus tôt dans certaines conditions. Pourquoi ?

Puisqu'on en sait UN PEU PLUS sur les moteurs (nous y reviendrons d'ailleur), parlons un peu de la fusée entière, et de la conception en étage.