LE SCRAMJET

C'est un statoréacteur dans lequel on ne cherche plus à obtenir une vitesse d'écoulement subsonique, ce qui ne signifie pas que l'air entrant n'est pas du tout ralenti. Il FAUT le ralentir pour augmenter la pression (transformation d'une partie de la pression dynamique en pression statique).

Comme pour les autres moteurs, la pression statique interne doit toujours être supérieure à la pression extérieure. Ce ralentissement est obtenu, comme d'habitude, par des ondes de choc, qui sont, de toute manière, inévitables sur toute partie saillante dans un flux supersonique.

En simplifiant à l'extrême, un scramjet, c'est ça:

En bleu-mauve, les ondes de choc à l'entrée qui ralentissent le flux.
Dans le convergent, la vitesse baisse aussi tandis que la pression monte (effet d'un convergent sur un écoulement SUPERSONIQUE), mais la vitesse reste TOUJOURS SUPERSONIQUE.

Remarquez l'absence de partie convergente à la tuyère. Cela n'a rien d'étonnant, le convergent d'une tuyère sert exclusivement à accélérer le flux jusqu'à la vitesse du son, or dans un scramjet, le flux est déja supersonique. Un convergent aurait, dans ce cas pour effet de ralentir le flux, c'est le contraire du but recherché.

Par contre, la partie centrale (l'étranglement), dans laquelle s'opère le mélange air carburant avant inflamation, sera rallongée car l'écoulement est si rapide que le carburant et l'air n'auraient pas le temps de s'y mélanger.

Ce dessin est très simplifié, celui-ci est mieux:

Sur un wave rider (comme le X43, voir page: Mach 5 et plus), le convergent commence au nez de l'avion, et le divergent, c'est l'arrière de l'avion. On peut dire que, dans ce cas, une bonne partie du moteur est extérieure.

Les principaux obstacles à la réalisation d'un scramjet efficace sont:

  1. Le carburant doit être capable de bruler en un temps record. Par exemple: un flux à 10800 km/h, ou 3000 m/s traverse un moteur de 12 mètres de long (c'est pourtant déja pas mal long) en 4 millièmes de seconde !!!
  2. Le moteur doit pouvoir assurer un mélange air/carburant aussi parfait que possible en un temps record aussi et pour le même raison. Une solution peut être de remplacer le canal où se fait le mélange par une série de canaux beaucoup plus étroits dont les parois contiennent des injecteurs.
    Schématiquement, c'est un peu comme ceci:

    Ou, plus proche de la réalité, comme ceci:
  3. Le moteur est soumis, tout à la fois, à un échauffement du à la combustion du carburant dans la chambre (quoi de plus normal?) ET à un échauffement cinétique ENORME du aux vitesses hypersoniques.
  4. La combustion, en plus d'être ultra rapide, doit être STABLE, et ne pas être "soufflée" par l'écoulement à très, très haute vitesse.

Les problèmes liés à la vitesse et à la stabilité de la combustion, et surtout, ceux liés à l'échauffement cinétique, ont retardé la mise au point de scramjets efficaces, alors que l'on parle de ses moteurs depuis de nombreuses années. En fait, les modèles testés actuellement (par exemple: le X43) ont résisté quelques tout petits instants.

Plus la vitesse augmente, plus la combustion devrait être rapide pour rester efficace, et ce n'est pas si simple.
Le statoréacteur "classique" est limité aux alentour de Mach 6, parceque l'échauffement consécutif au ralentissement important de l'air d'admission (il doit être SUBSONIQUE), et à sa compression, altère fortement le rendement du moteur (voir: la propulsion 11). De la même manière, l'échauffement CINETIQUE cette fois peut influencer négativement le rendement.

Que ce soit pour des raisons de t° ou de vitesse de combustion, le rendement d'un scramjet diminue au dessus d'une certaine vitesse (comme les turboréacteurs et statoréacteurs, somme toute).

Voici un graphique représentant l'évolution de l'impulsion spécifique (voir: l'impulsion spécifique à la page: l'ultime frontière) de différents moteurs par rapport à la vitesse.

Cette image est de l'ONERA sur www.onera.fr

On y voit, entre autre, qu'un scramjet, même utilisant l'hydrogène comme carburant (c'est le plus énergétique), voit son impulsion spécifique se réduire avec la vitesse jusqu'à ne plus présenter le moindre avantage par rapport au moteur fusée, aux alentour de Mach 18. On peut y voir aussi les vitesses d'efficacité maximum pour chaque type de moteur.

Si on veut réaliser un avion hypersonique satellisable, voila encore un obstacle de plus.
Mais, pour éviter tous ces ennuis, ne pourrait-on pas ralentir l'air quand même, par des moyens plus sophistiqués qui ne provoquerait pas d'échauffement ? On en parle ici, mais c'est un peu hors sujet, et spéculatif.