Comme vous pouvez le voir sur ce dessin, l'écoulement quitte l'aile dans le prolongement du bord de fuite, ce qui signifie qu'en l'absence de dispositifs hypersustentateurs (dont nous parlerons plus tard), l'écoulement en aval de l'aile suit donc une trajectoire plus ou moins parallèle au plan de l'aile.


En volant, un avion dévie donc l'air vers le bas suivant un angle proche de l'angle d'attaque de ses ailes, ce qui signifie un angle assez faible, presque exactement parallèle à l'axe de l'avion. Et c'est de la réaction à cette déviation que l'on doit la force de portance.


Il se redresse ensuite par amortissement sur les couches d'air à la fois "avales" et inférieures, et c'est entre autre, cet amortissement qui fait croire à certains que cette façon d'expliquer la portance est une erreur.....

Sauf que, non seulement ce n'est pas une erreur, mais c'est tout à la fois l'explication la plus réelle,  et la plus indiscutable (parce que nécessaire).



Pour ceux qui veulent plus de précisions sur la réalité de cette déviation, cliquez ici


 Cette déviation peut être décrite comme incurvation de l'écoulement qui tourne***  autour de l'aile comme sur ce dessin:


(***) Cette approche constitue en elle même une sorte de troisième description de la portance: la circulation.

Et il faut bien sûr ajouter que toutes ces descriptions: différence de pression et donc Bernouilli, déviation de l'écoulement d'air et donc Newton, et circulation (Kutta-Joukowsky), décrivent le même phénomène de trois points de vue différents mais en aucun cas contradictoires, pas même concurrents.



En fait, cette rotation de l'air autour de l'aile est initiée par le tourbillon libre qui se forme au bord de fuite et dont on a déjà parlé précédemment.

Avant de se détacher et d'être emporté par l'écoulement, ce tourbillon libre induit un autre tourbillon, plus large puisque contournant toute l'aile, et tournant en sens inverse qui correspond de fait à la rotation de l'air autour de l'aile (la circulation).

On peut obtenir la même circulation d'air autour d'un cylindre en rotation dans un écoulement et donc une portance.

On peut donc décrire la portance comme le résultat de la circulation (rotation) de l'air autour de l'objet (aile ou cylindre), pour peu que la courbure des lignes de courant soit telle que l'ouverture de la courbe soit orientée vers le bas, et c'est en cela qu'il y a équivalence avec une déviation vers le bas.

Cette circulation n'est possible que dans le cadre d'un bord de fuite fin, qui interdit son contournement (comme expliqué à la page précédente), c'est la condition de Kutta.



D'un point de vue physique, la portance peut aussi être décrite comme conséquence de la variation de la composante verticale de la quantité de mouvement de la masse d'air "dérangée".


Tout le monde (ou presque) connait la célèbre équation de Newton: F = m*a.


Cette équation peut aussi s'écrire: F = d(m*v) / dt.

La force (F) apparait alors comme la variation de la quantité de mouvement (m*v) par unité de temps (ce qui donne un taux de variation de la quantité de mouvment).

Remarque: si m est une constante, on peut l'écrire alors sous la forme: F = m*dv/dt, et puisque dv/dt représente l'accélération (dv/dt = a), on retrouve F = m*a.


Appliqué à la portance, cela signifie que la force de portance est égale au taux de variation DE LA COMPOSANTE VERTICALE de la quantité de mouvement de l'écoulement d'air.


Pourquoi de la composante verticale? parce qu'il est bien évident que l'orientation de la force détermine l'orientation de la quantité de mouvement "associée" (la quantité de mouvement et la force sont des grandeurs vectorielles, leur orientation et leur sens comptent donc), en d'autres termes pour obtenir une force verticale (par ex.) il faut une variation de quantité de mouvement elle aussi verticale.

Où trouve-t'on cette variation de la quantité de mouvement dans un plan vertical autour d'une aile?

La rotation de l'air autour du profil fait que le mouvement ascentionnel de l'air devant l'aile (upwash) s'oriente d'abord à horizontale, puis vers le bas.

Sur la partie avant de l'aile, l'air passe d'un mouvement ascensionnel (upwash) à un mouvement horizontal (par rotation), ceci correspond de fait à un ralentissement puis une annulation de ce mouvement ascensionnel.

Pour ralentir un mouvement ascensionnel (donc vers le haut), il faut une force (donc une variation de quantité de mouvement par unité de temps) vers le bas (ceci peut être ASSIMILÉ, à une déviation vers le bas au sens large).

Sur la partie arrière de l'aile, l'air passe d'un mouvement horizontal à un mouvement descendant (toujours par rotation), la déviation vers le bas est ici évidente de même que la modification de la quantité de mouvement (dans le plan vertical).

La variation de la composante verticale de la quantité de mouvement de l'écoulement d'air tient donc dans la transformation du mouvement ascendant en amont du profil (upwash) en un mouvement descendant en aval (downwash).

On peut dire ainsi qu'une déviation vers le bas ne doit pas forcément seulement correspondre à un mouvement vers le bas, elle peut aussi correspondre au ralentissement d'un mouvement ascendant.

C'est bien ce qu'il se passe dans le mouvement de rotation de l'air autour de l'aile: ralentissement du mouvement ascendant sur la partie avant de l'aile (pour l'orienter à l'horizontale), et mouvement réellement descendant sur la partie arrière.

Enfin, et pour en terminer avec la portance et la déviation de l'air, voici l'ultime description du phénomène, la plus fidèle, la plus "vraie".

On l'a dit plus haut, l'air tourne autour de l'aile ou du cylindre comme sur les dessins ci dessous:

La rotation de l'air autour de l'aile peut être décrit comme un tourbillon qui vient s'ajouter à l'écoulement horizontal d'origine.

En additionnant les deux, on obtient.

Un écoulement circulaire faisant le tour du profil sur l'extrados, et un écoulement presque horizontal mais ralenti sous l'intrados.

Pour que l'écoulement soit circulaire sur l'extrados, il faut qu'il soit soumis à une force centripète globalement dirigée vers le bas, ce qui correspond bien à l'idée d'une déviation vers le bas.

Une version "corrigée" pour tenir compte de la variation du rayon de courbure de la trajectoire de l'écoulement, et donc de la valeur "locale" de la force.

En aval, l'écoulement se redresse (à droite de la ligne verte), non pas à cause de l'aile, mais pour une raison extérieure, à savoir: la réaction des couches d'air inférieures en surpression relative.

Cette surpression transmettra jusqu'au sol la quantité de mouvement correspondant à la portance, c'est une obligation liée à la conservation de cette même quantité de mouvement.