A défaut d'avoir pu envoyer des hommes sur la lune, les russes réussirent à y poser plusieurs sondes qui prirent des photos, firent quelques analyses du sol (*), et même ramenèrent des échantillons (Luna XVI, Luna XX) (**).
(*) Les sondes Luna XVII (novembre 1970), et Luna XXI (aout 1973) par exemple emportaient avec elles un petit robot télécommandé (le Lunakhod ou Lunokhod) capable de se déplacer sur le sol lunaire grâce à 8 roues mues par de petits moteurs électriques. Lunakhod 1 (mission Luna XVII), et Lunakhod 2 (mission Luna XXI) se promenèrent ainsi sur la Lune en procédant à diverses analyses et prises d'images.
Leur équipement: caméras, télescope et spectromètre à rayons X, détecteur de radiation, etc.. + un miroir conçu pour renvoyer les faisceaux laser qu'on lui adresse, et ainsi permettre de mesurer la distance Terre-Lune avec une extrême précision.
Les deux engins étaient semblables, ici Lunakhod I "fermé",
et ici Lunakhod II et son "couvercle"/réflecteur laser "ouvert".
(**) Luna XVI ou Luna XX, de toute façon elles sont semblables.
Après avoir récupéré des échantillons grâce à son bras (à gauche), la "moitié" supérieure de la sonde décolle et retourne vers la Terre. La petite sphère noire visible au sommet de la sonde contient les échantillons, c'est la seule partie qui arrive sur Terre saine et sauf, parce que c'est la seule partie à être protégée pour la rentrée atmosphérique.
Les fusées à étage sont efficaces mais elle ne sont guère économiques. En effet, seule une petite partie (la capsule) revient sur Terre en plus ou moins bon état, le reste est entièrement perdu.
Le(s) premier(s) étage(s) retombe(nt) lourdement et est (sont) donc irrécupérable(s). Le(s) dernier(s) étages(s), plus rapide(s), brûle(nt) en rentrant dans l'atmosphère.
La solution? le vaisseau récupérable en tout ou
partie, et de préférence en tout.
En d'autres termes: La navette spatiale, ou space shuttle ou Space
Transportation System (STS).
Les premiers projets de navette étaient très
ambitieux.
Certains ingénieurs avaient même
imaginé un
système formé d'une sorte
d'avion-fusée suborbital
géant portant une navette spatiale sur le dos.
L'ensemble formait ainsi un lanceur à deux étages
totalement récupérable; l'avion-fusée
géant
servant de premier étage revenant se poser tout simplement
sur
une piste d'atterrissage classique, après s'être
séparé de la navette proprement dite. De son
côté, la navette devait emporter une
quantité de
carburant suffisante pour terminer seule sa satellisation.
Après quelques sages corrections et quelques réductions budgétaires, le résultat final fut ce que l'on connaît aujourd'hui, et que l'on voit sur l'image ci-dessus.
Tout n'est pas récupérable, puisque on perd le gros réservoir central, mais le plus important (et le plus coûteux) peut être réutilisé (la navette elle-même, et les deux boosters).
Le Space Shuttle fait environ 58 mètres de haut (avec son réservoir central), pour un poids au décollage de plus de 2000 tonnes; il est propulsé par deux boosters à propergols solides d'un peu moins de 1250 tonnes de poussée chacun, et trois moteurs à hydrogène et oxygène liquides (les SSME) fournissant, à eux trois, une poussée totale de 525 tonnes. La poussée totale au décollage de l'ensemble (SSME + boosters) est donc de plus de 3000 tonnes.
La navette devait donc diminuer très largement le coût des vol spatiaux, grâce à la réutilisation du même vaisseau, et augmenter la sécurité, grâce à sa très haute technologie.
Elle ne fit ni l'un ni l'autre.
A cause de la complexité du système, les révisions obligatoires après chaque vol sont plus longues et plus chères que prévu.
Le coût de construction d'une navette est si élevé que leur nombre est resté très modeste.
C'est ainsi qu'il fut impossible d'approcher, même de loin, la cadence d'un vol par semaine qui avait été évoquée au début du programme. C'était pourtant une des conditions à remplir pour faire baisser le coût de la conquête spatiale.
Avec des révisions, et des entretiens plus chers que prévus, et une cadence de vol plus basse que prévue, la navette est devenue le système de lancement le plus coûteux du monde; c'est exactement le contraire de ce qui était recherché.
Comme si cela ne suffisait pas, les catastrophes de Challenger et de Columbia mirent à mal la réputation de fiabilité de la navette.
Tout cela est extrêmement dommage car, à défaut d'être capable de voyages lointains susceptibles de nous faire rêver (elle ne peut que aller sur orbite "basse"), la navette spatiale est le premier "vrai" vaisseau spatial du point de vue de son look, et sans elle il n'aurait sans doute pas été possible de réaliser des missions telles que la réparation de Hubble sur orbite.
Les russes, qui avaient commencé un programme de navette (Bourane), l'ont abandonné, surement pour des questions de coût, peut-être aussi pour des questions de difficultés de mise au point influençant négativement la fiabilité du système.
La navette bourane sur le lanceur Energia.
Contrairement à la navette spatiale américaine, Bourane ne dispose que de moteurs orbitaux; TOUS les propulseurs principaux servant à la mise en orbite font partie du lanceur Energia. Car, contrairement à ce que pourrait suggérer la ressemblance avec le réservoir central de la navette américaine, la partie centrale du lanceur Energia est un authentique étage de fusée, et est donc équipé de moteur.
Sans la navette Bourane, Energia ressemble à celà:
Conçue après l'échec de la fusée lunaire N1, et initialement prévue pour pouvoir satelliser une charge maximum pouvant aller jusqu'à 175 tonnes, soit une cinquantaine de tonnes de plus que Saturn V, elle ne fut utilisée que deux fois, et en version ayant une capacité maximale d'un peu moins de 100 tonnes de charge utile.
La masse au décollage d'Energia (avec sa charge) peut atteindre un maximum de 2400 tonnes.
La fusée centrale est propulsée par quatre moteurs de près de 150 tonnes de poussée chacun. Ces moteurs sont de conception classique: une seule chambre (et donc une seule tuyère) par moteur.
Les boosters sont à propergols liquides (oxygène liquide + kérozène); ils sont équipés, chacun, d'un seul moteur à quatre chambres (et donc quatre tuyères) de près de 750 tonnes de poussée unitaire.
La poussée totale au décollage est de plus de 3500 tonnes.
Son premier vol fut pour placer la station (militaire?) Polyus en orbite, mais ce fut un échec (panne de Polyus lui même).
Son deuxième et dernier vol se fit avec Bourane. Malgré la pleine réussite de ce vol (automatique, et sans personne a bord), la navette Bourane ne redécolla jamais, et finit détruite accidentellement dans son hangar.
Il est fort possible, sinon probable, que après le vol de la navette Bourane, les russes se soient rendus compte que ce système n'était ni économique (et leur moyens financiers n'étaient pas au mieux), ni particulièrement plus fiable que les capsules.