Comme nous l'avons vu à la page précédente, l'effet Hall consiste à créer une différence de potentiel locale (ou un courant comme on va le voir) en déviant la trajectoire de particules éléctrisées (des électrons par ex.) grâce à un champs magnétique.
Voyons comment on peut tirer parti de cet effet dans un moteur ionique.
Bien que l'on retrouve, dans le moteur à effet Hall, les même éléments que dans le moteurs ionique "à grille" (anode, cathode, aimants, injection de xénon), le système est différent car il permet d'accélérer les ions sans recourir à une grille, et cela précisément grâce à l'effet Hall.
Dans un moteur à effet Hall, on trouve:
- Un corps cylindrique court et un moyeu central laissant, entre les deux, un canal annulaire au fond duquel on trouve l'anode (électrode positive, 1). Celle-ci est percée de petits trous par lesquels le xénon est injecté (4).
- Des aimants (2); en forme d'anneau entourant le canal, et dans le moyeu.
Il
s'établit alors un champs magnétique entre le cylindre extérieur et le
moyeu central comme indiqué par le chiffre 3.
On dit alors un champs radial (comme les rayons d'une roue).
Dans la
réalité, le champs n'est pas parfaitement radial, il a une petite
composante longitudinale (d'avant en arrière, si vous préférez).
La cathode fonctionne comme un canon à électrons, et est placée à l'extérieur. Elle envoie ses électrons vers la sortie du moteur (5).
Les électrons, qui veulent rejoindrent l'anode, sont déviés par le champs magnétique (force de Lorentz) et se mettent à tourner autour du moyeu près de la sortie du moteur; ils forment alors ce que l'on appelle un courant de Hall (6).
Il y a donc, près de la sortie (là où le champs magnétique est le plus fort) un "nuage" d'électrons en forme d'anneau en rotation.
Ce nuage annulaire est donc chargé négativement (les électrons sont négatifs), et constitue une sorte de "cathode" susceptible d'attirer des ions positifs.
Les atomes de xénon (en vert, neutres) sortent par les trous traversant l'anode, ils arrivent donc dans la cavité annulaire là où le champs électrique de l'anode est prépondérant; cette zone est donc positive.
Plus ils progressent vers la zone négative, plus ils sont susceptibles d'entrer en collision avec des électrons issus du courant de Hall et qui se dirigent vers l'anode.
Ce sont précisément ces collisions qui ionisent les atomes de xénon et les transforment en ions positifs par "arrachage" d'électrons lors de la collision (c'est l'ionisation par bombardement comme déjà décrite à la page précédente).
Chaque fois qu'un ions positif est formé, il est fortement attiré et accéléré par la zone négative.
Les ions positifs peuvent récupérer des électrons et retrouver leur neutralité à la sortie du moteur, parfois déjà dans le courant de Hall, ou dans le flux d'électrons issus de la cathode creuse (canon à électrons).
Plus les électrons sont proches de l'anode, plus ils sont attirés, accélérés, et donc rapides. C'est la raison pour laquelle leur effet est différent: ionisateurs par collision lorsqu'ils sont rapides, et neutralisateurs par recombinaison lorsqu'ils sont plus lents.
Le moteur à effet Hall permet donc d'accélérer des ions SANS recourir à un système de grilles susceptibles d'être déteriorées avec le temps par le jet d'ions.
Il a, par contre, le désavantage d'émettre un jet plus divergent que le système à grilles. C'est un effet secondaire involontaire de l'éxistence d'une composante longitudinale du champs magnétique issus des aimants (rien n'est parfait).
Cette divergence (8) du jet produit une composante non axiale de la poussée, entrainant une diminution de fait de la poussée "utile".
Sur image ci-dessous, la divergence n'est pas visible, mais la cathode, le moyeu, et le canal annulaire apparaissent clairement.
Comparés aux moteurs chimiques, par exemple, les propulseurs ioniques ont l'incontestable avantage de fournir une impulsion spécifique énorme (elle peut même dépasser 10.000 secondes!), mais ils ont par contre un désavantage très net en terme de poussée (quelques grammes à quelques dizaines de grammes).
Pour
expliquer ce qu'est l'effet Hall, on a parlé des forces de Lorentz (et
de Laplace), ce genre de force (électromagnétique) ne pourrait-il pas
être utilisé pour accélérer directement
un plasma?
Car même dans le moteur à effet Hall, ce sont des forces électrostatiques qui
accélèrent les ions.
La réponse est OUI, et c'est le cas, par exemple du moteur magnétoplasmadynamique (MPD) dont nous allons maintenant parler.